En Afrique, la mobilisation de ressources pour financer des projets devant permettre un développement inclusif et durable reste un défi. Pour y parvenir, diverses alternatives crédibles s’offrent, de plus en plus. Au nombre de celles-ci, la titrisation de créances qui, ailleurs, a déjà fait ses preuves d’instrument actif d’appui à la croissance économique, et qui reste peu investie dans le marché ouest-africain. A l’occasion des BRVM Awards 2025 déroulés à Cotonou les 29 et 30 avril, Olivier Gui, Manager chez Africa Link Capital, Cabinet de Conseil en Ingénierie Financière a répondu à deux questions de « L’économiste du Bénin » sur cet instrument de mobilisation.
En tant qu’acteur du secteur financier, vous êtes engagé dans la mobilisation de ressources pour les États, à travers la titrisation de créances. En quoi est-ce que cet instrument est-il important ?
La titrisation de créances, à notre avis, et ça a été démontré sur les marchés les plus matures en Europe et aux États Unis, en Asie… c’est un puissant instrument de développement économique et social. C’est un mécanisme auquel nos États doivent avoir recours. C’est une première qui a été réalisée avec le “Fonds Électricité pour Tous” pour financer le programme “Électricité pour Tous” qui a été mis en œuvre par l’Etat de Côte d’Ivoire pour donner l’accès à l’électricité aux populations rurales et périurbaines. A notre avis, la titrisation est ce mécanisme financier qui permet d’agréger les différents profils de bailleurs parce qu’à travers un véhicule de titrisation, autant les investisseurs classiques sur le marché financier tels que les assureurs, les fonds communs de placement, les compagnies de prévoyance sociale peuvent financer, autant l’Etat peut financer via un véhicule de titrisation, autant les bailleurs internationaux et même les particuliers peuvent s’intéresser. Le thème de ce jour (des BRVM Awards 2025 à Cotonou, ndlr) qui porte sur la privatisation des sociétés d’Etat à travers le marché financier permet aux populations de s’intéresser au marché financier en termes d’épargne, en termes de placement. Pour nous, la titrisation, d’ici les prochaines années, devrait définitivement se mettre au cœur des mécanismes de financement de nos Etats pour impacter véritablement le développement économique et social.
Quelles sont les conditions nécessaires à remplir pour renforcer l’efficacité de ces instruments au service des économies ?
À notre avis, les bases sont déjà posées avec le cadre réglementaire qui a été mis en place en 2010 et, au fil des années, par les transactions qui ont été réalisées, je pense qu’on a un peu moins d’une vingtaine de transactions globalement réalisées sur le marché financier en matière de titrisation de créances. Les bases sont déjà là. C’est surtout un exercice de promotion de l’instrument, de formation quant à l’impact potentiel de cet instrument en termes de développement pour nos Etats, en termes de capacité de financement. Parce que, dans notre zone, en Afrique de l’Ouest, on a des besoins très importants, notamment en matière d’infrastructures, d’électrification, d’accès à l’eau. Et la titrisation de créances, justement, permet d’aller vers des investisseurs pour financer directement les personnes qui ont besoin de ces infrastructures-là. C’est un peu ce qui a été fait sur le Programme d’électricité pour tous. Et cette transaction-là est un peu l’exemple, une sorte de transaction-projet pour tous les Etats de la zone afin qu’ils regardent un peu plus attentivement l’option qu’est la titrisation de créances pour financer les divers projets dont ils ont besoin pour justement mettre en place des infrastructures structurantes pour le développement de leurs Etats.
Réalisation : Sylvestre TCHOMAKOU